Réflexions ou sentences et maximes morales | страница 10
Il est difficile de juger si un procédé net, sincère et honnête est un effet de probité ou d’habileté.
Les vertus se perdent dans l’intérêt, comme les fleuves se perdent dans la mer.
Si on examine bien les divers effets de l’ennui, on trouvera qu’il fait manquer à plus de devoirs que l’intérêt.
Il y a diverses sortes de curiosité: l’une d’intérêt, qui nous porte à désirer d’apprendre ce qui nous peut être utile, et l’autre d’orgueil, qui vient du désir de savoir ce que les autres ignorent.
Il vaut mieux employer notre esprit à supporter les infortunes qui nous arrivent qu’à prévoir celles qui nous peuvent arriver.
La constance en amour est une inconstance perpétuelle, qui fait que notre cœur s’attache successivement à toutes les qualités de la personne que nous aimons, donnant tantôt la préférence à l’une, tantôt à l’autre; de sorte que cette constance n’est qu’une inconstance arrêtée et renfermée dans un même sujet.
Il y a deux sortes de constance en amour: l’une vient de ce que l’on trouve sans cesse dans la personne que l’on aime de nouveaux sujets d’aimer, et l’autre vient de ce que l’on se fait un honneur d’être constant.
La persévérance n’est digne ni de blâme ni de louange, parce qu’elle n’est que la durée des goûts et des sentiments, qu’on ne s’ôte et qu’on ne se donne point.
Ce qui nous fait aimer les nouvelles connaissances n’est pas tant la lassitude que nous avons des vieilles ou le plaisir de changer, que le dégoût de n’être pas assez admirés de ceux qui nous connaissent trop, et l’espérance de l’être davantage de ceux qui ne nous connaissent pas tant.
Nous nous plaignons quelquefois légèrement de nos amis pour justifier par avance notre légèreté.
Notre repentir n’est pas tant un regret du mal que nous avons fait, qu’une crainte de celui qui nous en peut arriver.
Il y a une inconstance qui vient de la légèreté de l’esprit ou de sa faiblesse, qui lui fait recevoir toutes les opinions d’autrui, et il y en a une autre, qui est plus excusable, qui vient du dégoût des choses.
Les vices entrent dans la composition des vertus comme les poisons entrent dans la composition des remèdes. La prudence les assemble et les tempère, et elle s’en sert utilement contre les maux de la vie.
Il faut demeurer d’accord à l’honneur de la vertu que les plus grands malheurs des hommes sont ceux où ils tombent par les crimes.
Nous avouons nos défauts pour réparer par notre sincérité le tort qu’ils nous font dans l’esprit des autres.