Том 4. Письма, 1820-1849 | страница 16
«Je me tire violemment de mon apathie, pour vous écrire par le moyen de la meilleure moitié de mon être, c’est-à-dire de celle qui n’est pas aussi paresseuse. J’avais espéré que Krüdener m’apporterait une lettre de vous, mais il ne m’a apporté qu’une preuve nouvelle de cette affinité d’indolence qui nous fait préférer une correspondance mentale à tout autre; au fait, ce qui m’importerait le plus de savoir de vous, ce serait si nous pouvons avoir quelqu’espoir de vous arracher pour quelques jours à votre liquidation et — ici ma main rebelle se regimbe contre moi et prétend que tout ce que je vous dis ne sont que fadaises qui ne méritent pas d’être écrites même avec son mauvais orthographe, et voilà pourtant une chose qui me tient à cœur: avez-vous eu des nouvelles de Moscou? — Dans la dernière lettre que j’en ai eu les pauvres vieux étaient pleins d’inquiétude à cause de notre silence et vous croyaient bien positivement mort de choléra>*.
Au risque de paraître indiscret au commis du bureau de poste qui ouvrira cette lettre, je ne puis m’empêcher de vous dire quelques mots de politique. Il paraît que toutes les admonitions de Pozzo>* à Berlin n’ont pas donné à la Prusse l’heureuse témérité qui lui manque, et qu’elle est bien décidée à n’en pas venir aux mains avec la France pour la question d’Anvers>*; mais qu’arriverait-il si le Roi Guillaume, qui est plus mauvaise tête que son parent>*, allait faire son coup de feu contre les Français, — là, selon moi, est toute la question, et bien certainement que dans cet instant il n’y a pas un seul homme en Europe qui puisse le prédire. En attendant ces grands événements nous sommes ici à tourner dans le cercle fort étroit d’une vie de capitale de province; il n’y a ici de sérieusement occupé que Potemkine qui est toujours aussi fou d’amour pour sa Grâce divinité, avec cette différence qu’à présent, vu la saison, il fait ses farces en présence d’un parterre beaucoup plus nombreux. Sa fureur jalouse contre Sercey se réveille aussi parfois, et bientôt elle va acquérir un nouvel aliment à l’occasion d’un bal que celui-ci va donner pour fêter la régence>*, mais que Potemkine croit très fermement être destinée à la belle Rose».
Und jetzt schreibe ich kein Wort mehr.
Adieu, mon ami.
«A propos de ma santé», — c’est de la sienne qu’il s’agit, — «je suis tourmenté par des héroïdes, soit dit par contraction, pour ne pas effaroucher ma main qui déjà s’impatiente et trépigne des pieds. Ainsi donc adieu» — et moi aussi adieu. N. T.