Том 3. Публицистические произведения | страница 41
Aussi, en dépit de cette prétendue incompétence et de sa neutralité constitutionnelle en matière de religion, nous voyons que partout où l’Etat moderne s’est établi, il n’a pas manqué de réclamer et d’exercer vis-à-vis de l’Eglise la même autorité et les mêmes droits que ceux qui avaient appartenu aux anciens pouvoirs. Ainsi en France, par exemple, dans ce pays de logique par excellence, la loi a beau déclarer que l’Etat comme tel n’a point de religion, celui-ci, dans ses rapports à l’égard de l’Eglise catholique, n’en persiste pas moins à se considérer comme l’héritier parfaitement légitime du Roi très chrétien, — du fils aîné de cette Eglise.
Rétablissons donc la vérité des faits. L’Etat moderne ne proscrit les religions d’Etat que parce qu’il a la sienne — et cette religion c’est la Révolution. Maintenant, pour en revenir à la question romaine, on comprendra sans peine la position impossible que l’on prétend faire à la Papauté en l’obligeant à accepter pour sa souveraineté temporelle les conditions de l’Etat moderne. La Papauté sait fort bien quelle est la nature du principe dont il relève. Elle le comprend d’instinct, la conscience chrétienne du prêtre dans le Pape l’en avertirait au besoin. Entre la Papauté et ce principe il n’y a point de transaction possible; car ici une transaction ne serait pas une pure concession de pouvoir, ce serait tout bonnement une apostasie. — Mais, dira-t-on, pourquoi le Pape n’accepterait-il pas les institutions sans le principe? — C’est encore là une des illusions de cette opinion soi-disant modérée, qui se croit éminemment raisonnable et qui n’est qu’inintelligente. Comme si des institutions pouvaient se séparer du principe qui les a créées et qui les fait vivre… Comme si le matériel d’institutions privées de leur âme était autre chose qu’un attirail mort et sans utilité — un véritable encombrement. D’ailleurs les institutions politiques ont toujours en définitive la signification que leur attribuent, non pas ceux qui les donnent, mais ceux qui les obtiennent — surtout quand ils vous les imposent.
Si le Pape n’eût été que prêtre, c’est-à-dire si la Papauté fût restée fidèle à son origine, la Révolution n’aurait eu aucune prise sur elle, car la persécution n’en est pas une. Mais c’est l’élément mortel et périssable qu’elle s’est identifié qui la rend maintenant accessible à ses coups. C’est là le gage que depuis des siècles la Papauté romaine a donné par avance à la Révolution.