Réflexions ou sentences et maximes morales | страница 15
Il n’est pas si dangereux de faire du mal à la plupart des hommes que de leur faire trop de bien.
Rien ne flatte plus notre orgueil que la confiance des grands, parce que nous la regardons comme un effet de notre mérite, sans considérer qu’elle ne vient le plus souvent que de vanité, ou d’impuissance de garder le secret.
On peut dire de l’agrément séparé de la beauté que c’est une symétrie dont on ne sait point les règles, et un rapport secret des traits ensemble, et des traits avec les couleurs et avec l’air de la personne.
La coquetterie est le fond de l’humeur des femmes. Mais toutes ne la mettent pas en pratique, parce que la coquetterie de quelques-unes est retenue par la crainte ou par la raison.
On incommode souvent les autres quand on croit ne les pouvoir jamais incommoder.
Il y a peu de choses impossibles d’elles-mêmes; et l’application pour les faire réussir nous manque plus que les moyens.
La souveraine habileté consiste à bien connaître le prix des choses.
C’est une grande habileté que de savoir cacher son habileté.
Ce qui paraît générosité n’est souvent qu’une ambition déguisée qui méprise de petits intérêts, pour aller à de plus grands.
La fidélité qui paraît en la plupart des hommes n’est qu’une invention de l’amour-propre pour attirer la confiance. C’est un moyen de nous élever au-dessus des autres, et de nous rendre dépositaires des choses les plus importantes.
La magnanimité méprise tout pour avoir tout.
Il n’y a pas moins d’éloquence dans le ton de la voix, dans les yeux et dans l’air de la personne, que dans le choix des paroles.
La véritable éloquence consiste à dire tout ce qu’il faut, et à ne dire que ce qu’il faut.
Il y a des personnes à qui les défauts siéent bien, et d’autres qui sont disgraciées avec leurs bonnes qualités.
Il est aussi ordinaire de voir changer les goûts qu’il est extraordinaire de voir changer les inclinations.
L’intérêt met en œuvre toutes sortes de vertus et de vices.
L’humilité n’est souvent qu’une feinte soumission, dont on se sert pour soumettre les autres; c’est un artifice de l’orgueil qui s’abaisse pour s’élever; et bien qu’il se transforme en mille manières, il n’est jamais mieux déguisé et plus capable de tromper que lorsqu’il se cache sous la figure de l’humilité.
Tous les sentiments ont chacun un ton de voix, des gestes et des mines qui leur sont propres. Et ce rapport bon ou mauvais, agréable ou désagréable, est ce qui fait que les personnes plaisent ou déplaisent.